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Cette grande voyageuse de par
le monde a pris depuis longtemps, l’habitude de photographier l’objet de sa passion, les arbres.
Ils sont au cœur de son œuvre de sculpture céramique.
Des arbres ? Des personnages
oniriques ? Sans aucun doute, des compositions tenant d’un univers fantastique, où nous entraînent les sculptures de grès sombre de Patricia Cassone. Chacune d’elle s’élève du sol à partir d’une base solide. La terre, tournée, détournée, semble hésiter, souffrir, offrant une chair pleine d’irrégularités, jusqu’à être trouée parfois. À un certain seuil, la forme semble éclater. Elle apparaît, divisée, offrant des directions surprenantes, proposant des figurations inattendues. Des jambes ? Des bras ? Des branches ? Des membres étirés vers le lointain. Tout cela devient une aspiration véhémente vers l’idéal d’un autre possible.
Dans ce mouvement de libération, chaque sculpture devient unique, comme pourraient l’être autant d’individus, êtres étranges, aux bras nus dressés prolongés de mains élégamment dépliées. S’agit-il d’une danse incantatoire ?
D’un cri véhément lancé par un tribun ? Les sculptures de grès de Patricia Cassone appartiennent au registre expressionniste.
Patricia Cassone a 26 ans de métier. Elle est marquée par une double influence : l’Asie, et tout particulièrement, le Japon ; la France, et son ancrage en Haute-Vienne.
Le Japon : elle est allée y travailler.
Elle s’en est imprégné. Elle a longuement étudié le grès traditionnel ou autres techniques de ce pays. Elle y a appris à participer, plusieurs jours durant, à la cuisson dans un four Anagama.
Elle y a tissé des liens d’amitié. En 2012, le Japonais Shozo Michikawa, qui a déjà construit plusieurs fois dans le monde un type de petit four Anagama, lui a apporté son concours pour créer le sien.

En France, il y a cette terre de Haute Vienne où elle vit, où son atelier se trouve face à une forêt de châtaigniers et de chênes trois fois séculaires.

Entre ceux-ci et la céramiste, s’établit un vrai dialogue.
Elle les observe, les voit se dénuder de leurs feuilles, apparaître dépouillés, laissant voir leurs formes tourmentées, support aux fruits de l’imaginaire.

Le Limousin, c’est ce pays granitique où elle collecte les argiles sauvages, cueille les variétés de feldspath, de sable, mêle ces richesses découvertes dans la nature aux produits trouvés dans le commerce.

À partir de ces deux pôles, tout est subtilité, le mélange de ses terres, la délicatesse de son enfournement, le choix de ses bois de cuisson, tendres ou durs, brûlés au moment choisi. C’est ainsi que Patricia Cassone parvient à la variété des effets de ses pièces de terre, de cendres et de fumées dits Yakishime. Ainsi chaque sculpture évoque la métamorphose d’un arbre, raconte une histoire, entraîne vers d’autres mondes. Comme si chacun d’eux espérait désormais quitter cet état de dépouille pour s’élever vers un autre univers. Une scène se crée. Nous devenons les spectateurs. L’histoire peut être drôle comme une farce, ou angoissante comme un drame. Le discours tenu peut être véhément. Allègrement, la forêt se met en marche. Telle est une des facettes de l’oeuvre céramique de Patricia Cassone.

MARIELLE ERNOULD-GANDOUET

Patricia Cassone a présenté ses arbres « L’éclat de l’ombre », Galerie Mediart, Paris, en février 2015.
Elle a participé en mai au Tea Bowl Festival, Mungyeong (Corée).

Elle sera à la Biennale Génération Céramique (cuissons bois) à Nontron (St Martial de Valette) en juillet-août, à la 17e exposition internationale du Chawan en septembre, Hemiksen (Belgique).